Barrage au RN : LR refuse de se désister - Florence Portelli - C à Vous - 02/07/2024

Est-ce qu'il y aurait dimanche une partie de la gauche, avec les macronistes et certains LR, qui pourrait travailler à former une alternative? Ca dépend des responsables politiques et des Français qui voteront dimanche. - A.-E.Lemoine: Les Français voteront dimanche dans le secret de l'isoloir. Ce soir, on a une responsable politique. Vous seriez prête à participer à cette grande coalition? - F.Portelli: Non. Plusieurs choses me choquent. La coalition plurielle, c'est quand vous avez une majorité... Depuis un certain temps, E.Macron n'a plus de majorité et plus de cap. Les gens sont désorientés. Sur la question du front républicain, je ne comprends plus ce que dit la majorité. - A.-E.Lemoine: Vous ne donnez pas de consigne de vote. - F.Portelli: Non, mais au moins, nous, c'est clair. E.Macron, il y a du "en même temps", du "un peu en même temps" ou du "pas du tout en même temps". Pendant un temps, E.Macron nous a dit front républicain contre le RN, puis finalement, ils font partie de l'arc républicain... - P.Cohen: Les retraits ont eu lieu. - F.Portelli: C'est récent. Il a eu des valses d'opinion sur la question du RN ces derniers temps, même contre son ancienne Première ministre. E.Philippe dit l'inverse sur LFI. Si on en est là avec le RN, il y a plusieurs facteurs, notamment le comportement de LFI qui frôle l'antisémitisme et la haine de l'autre, et aussi le "en même temps". C'est ce qui a fait émerger les extrêmes et ce qui a tué la démocratie. Je n'ai plus du toute envie d'y participer. Dans ce marasme ambiant, je pense que tout le monde a une part de responsabilité. - A.-E.Lemoine: Quelle est la vôtre? - F.Portelli: On ne peut pas dire: "Vous avez perdu différentes élections et vous avez fait passer E.Macron, mais depuis qu'il est au pouvoir, c'est vous qui êtes responsable." On est dans l'opposition. On n'est pas responsable du foutoir instauré par E.Macron. - P.Cohen: Vous êtes dans l'opposition comme le RN... - F.Portelli: Comme le PS et d'autres. - P.Cohen: Vous avez échoué à incarner une alternative plus crédible que le RN. - F.Portelli: Je suis d'accord. Evidemment qu'on a échoué. Aujourd'hui, on ne résiste pas trop mal. On nous avait prédit notre mort. Finalement, on s'en sort plutôt bien et avec les honneurs, ce qui n'est pas le cas de tout le monde. Après tout ça, il faudra se reconstruire avec une nouvelle façon de faire de la politique à droite, plus de diversité, plus de femmes et d'autres thématiques que celles qu'on a portées. Une qui nous est chère, c'est la culture. - A.-E.Lemoine: Il y avait un moyen de s'opposer au RN. - F.Portelli: Le battre. - A.-E.Lemoine: Le front républicain était défendu en son temps par J.Chirac. - F.Portelli: J.Chirac, sur l'antisémitisme, il était très clair. Je ne veux pas parler à sa place. Est-ce qu'il aurait soutenu une coalition avec des extrémistes? Je ne sais pas. - P.Cohen: X.Bertrand a parlé d'un gouvernement de sursaut national. - F.Portelli: On ne peut pas édulcorer ou relativiser l'antisémitisme, la haine de l'autre, la haine de la police, dire que c'est de l'humour... - P.Cohen: Les insoumis ont dit qu'ils n'iraient pas dans une coalition. - F.Portelli: Si le Front populaire avait la majorité... C'est LFI qui a le plus de circonscriptions. Ils auraient un Premier ministre. Je combats tous les extrêmes. Je n'ai jamais été pour l'extrême droite. J'ai une détestation de l'extrême droite et je continue à les appeler ainsi. Dans leur programme, des choses me choquent profondément, comme le fait de ne pas donner de logement social à des gens qui ne seraient pas français. Le fait de critiquer la binationalité. Ca me choque aussi que dans LFI, il y a eu les propos sur le Hamas, l'absence d'empathie pour les victimes du terrorisme du Hamas. On ne peut pas relativiser tout ça et dire un jour qu'on s'est indigné, un jour que ces gens peuvent provoquer une guerre civile et que le lendemain, pour garder son poste, que ce n'était finalement pas si grave. - A.-E.Lemoine: S'il n'y a pas de majorité... - F.Portelli: Ce sera le choix des Français. C'est le choix des gens! Je vais faire un mea culpa. Je pense qu'une des fautes de la droite, ça a été de revenir sur le référendum de 2005. Je n'étais pourtant pas pour ce résultat. Quand le peuple s'exprime, on doit le respecter. Le choix des Français ne sera peut-être pas le mien, mais je le respecte. - P.Cohen: Ca a été défendu au grand jour par N.Sarkozy lors de la présidentielle de 2007. Il a dit: "Si je suis élu, je reviendrai..." - F.Portelli: J'ai le droit de vous dire que c'était une faute. - P.Cohen: Oui, d'accord! Mais les Français ont voté en 2007 aussi. - F.Portelli: Oui, mais ils avaient voté pour le "non" en 2005. Si on avait respecté ça, on n'aurait peut-être pas un RN et une LFI aussi hauts, ainsi que les "gilets jaunes". - P.Lescure: Le RN répète depuis le début de la campagne qu'il leur faut une majorité absolue. Ce matin, M.Le Pen a été plus nuancée. - F.Portelli: C'est comme pour les retraites. Elle change souvent d'avis. - P.Lescure: Elle a parlé d'une majorité relative de 270 députés complétés par des soutiens. Ca pourrait venir du canal historique? - F.Portelli: Non. E.Ciotti a décrédibilisé la politique. Ceux qui restent sont des gens qui ont dit "jamais Macron" et qui, aujourd'hui, disent "jamais Bardella". Si c'était le cas, je ne serais pas devant vous en tant que vice-présidente des Républicains. Ce n'est pas un parti fréquentable. Je respecte les gens qui votent pour eux. Je peux comprendre l'exaspération et la colère, mais jamais je ne dirai que ce n'est pas un parti d'extrême droite. Je ne le pense pas. Quand on regarde les livres écrits sur J.Bardella, les gens qui composent les strates du RN, on se rend compte que ça n'a pas beaucoup changé. - E.Tran Nguyen: L'Elysée a appelé M.Le Pen à faire preuve de sang-froid et de mesure après qu'elle a dénoncé le coup d'Etat administratif supposé du camp macroniste. Elle explique se baser sur des rumeurs qu'elle a lues sur des nominations à des postes décisifs... - F.Portelli: C'est "Martine à la plage". Elle découvre l'eau chaude. Ca fait partie des prérogatives du président. Pour une fois qu'il fait des nominations rapidement... Il faut rappeler le scandale sur les nominations de directeurs de théâtre. Ca n'a choqué personne parce qu'on se fout complètement de la culture dans ce pays. Pour une fois qu'il fait ce qu'il faut, on ne va pas le critiquer! - E.Tran Nguyen: Elle perd son sang-froid? - F.Portelli: Non. Elle joue son rôle. Elle fait dans le complotisme. "Les élites contre le peuple"... Elle joue son rôle, lui, le sien. Ce n'est pas très intéressant. - A.-E.Lemoine: Il va se passer quoi pour LR le 8 juillet? Vous allez retrouver une vie normale? Un nouveau président va être désigné? - F.Portelli: Dans ce milieu, la vie normale... On aura un nouveau président, une nouvelle présidente, une nouvelle gouvernance. J'espère travailler sur des nouvelles thématiques, montrer une espérance nouvelle aux gens. Entre le bloc avec LFI ou l'extrême droite, il reste une droite républicaine qui peut émerger et qui, d'ailleurs, résiste. - P.Cohen: Vous avez quitté le pouvoir en 2012. - F.Portelli: Moi, pas! - P.Cohen: Non, mais l'UMP. Ca fait 12 ans. Vous n'avez pas trouvé le temps de vous préparer comme il fallait? - F.Portelli: On n'est pas les seuls. Pourtant, certains ont réussi à avoir une belle dynamique, comme le PS, avec R.Glucksmann. C'est dommage qu'il n'ait pas été jusqu'au bout dans le fait de repousser LFI. J'ai espoir. La clarification a été faite, notamment vis-à-vis des extrêmes et du macronisme. On va pouvoir bâtir quelque chose de nouveau. En revanche, si ce n'est pas réellement nouveau, si c'est juste du cosmétique, on va être dans l'opposition pendant longtemps. Je ne l'espère pas pour avoir un poste. Je suis maire, ça me va très bien. C'est passionnant. Les maires, c'est hyper utile. Je le souhaite pour mon pays. Les gens nous disent: "On est perdus. On aimerait ne pas avoir à faire ce choix dimanche."

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