Comment différencier
un avion Boeing d'un Airbus ? Si je me pose cette question,
c'est parce qu'en 2024, on entend beaucoup parler de Boeing. Et pas en bien. Un trou béant en plein
milieu de la carlingue. Cette série noire
qui continue pour le constructeur Boeing. Alors, que se passe-t-il ? D'où vient cette série noire
et faut-il vraiment s'inquiéter ? Il y a en fait
2 réponses à cette question. La première,
c'est ce que disent les chiffres. Commençons par
une petite recherche. Je tombe rapidement
sur ce graphique. Ces 10 dernières années,
Boeing semble effectivement avoir plus d'incidents
que son principal concurrent. La source est crédible. C'est l'administration américaine
en charge de la sécurité du transport. Mais en allant plus loin,
je tombe sur cet article qui dénonce une représentation trompeuse. Il est écrit par un analyste
du secteur aérien. Bon, pour y voir plus clair,
plongeons-nous dans les données à l'origine de ce graphique. Voici tous les événements
concernés par une enquête de cette administration américaine. Si on filtre par marque d'avion,
on obtient effectivement les mêmes résultats que le graphique. Alors, où est
le problème ? Des problèmes comme ça,
il y en a plein. Déjà, cette liste américaine
reprend surtout les événements liés aux États-Unis. Par leur itinéraire,
par leur compagnie ou parce que ce sont des avions américains,
comme par exemple, Boeing. Pour assurer une représentation
plus équitable entre les 2 constructeurs, il faut concentrer nos recherches
sur les États-Unis. Le problème, c'est que Boeing
y vole beaucoup plus qu'Airbus. Jusqu'à 2 fois
plus en fonction des années. Il faut donc rapporter
les incidents au nombre de vols effectués. Une fois tout ça pris en compte,
le tableau n'est plus du tout le même. Et sur les 10 dernières années,
on n'observe pas de réelles différences entre les 2 constructeurs. Ok, mais ça,
c'était avant. De nombreux incidents ont touché des Boeing. En 2024,
cette tendance est-elle en train de changer ? Toujours selon la même liste,
entre janvier et juin 2024, Boeing était impliqué dans 14 enquêtes. Comparé à la même période
ces 10 dernières années, c'est 2 fois plus que la moyenne. Dit comme ça, ça semble important. Mais les chiffres varient beaucoup
et on a déjà connu des années similaires. Et puis, ce n'est pas toujours
la faute de Boeing. En 2018,
par exemple, une blessure grave est signalée sur un de leurs vols. Mais quand on lit le rapport,
on découvre qu'un passager a bousculé une hôtesse
en sortant des toilettes. Elle transportait de l'eau chaude
et a été gravement brûlée, mais ça n'a pas grand-chose à voir avec l'avion. Alors, pour éviter ces billets,
Courtney Miller a classé les incidents par causes. Ces 10 dernières années,
ça donne ceci. Les incidents sont surtout liés
à des facteurs environnementaux ou à des erreurs humaines. Et même quand ils sont liés à l'appareil,
cela peut aussi être dû à une mauvaise maintenance
par les compagnies aériennes. La répartition est similaire chez Airbus,
mais à nouveau, c'est pour les 10 dernières années. Au moment d'enregistrer cette vidéo,
les rapports d'enquête pour les 6 premiers mois de 2024
ne sont pas complets. Mais sur les 14 événements,
7 seraient liés à des turbulences, 3 à des erreurs humaines
et 4 à un problème de l'appareil. C'est similaire aux observations
des 10 dernières années et Boeing ne serait donc a priori pas responsable
de la majorité d'entre eux. Bon, voilà pour les chiffres. Début 2024,
Boeing n'a a priori pas plus de problèmes que d'habitude. Mais l'histoire ne s'arrête pas là. Car au-delà des chiffres,
certains cas inquiétants montrent que Boeing
a bien un problème de sécurité. Pour comprendre ce paradoxe,
il faut s'intéresser à un événement de cette liste. Le vol du 5 janvier 2024
opéré par Alaska Airlines. Ce jour-là, une porte
s'arrache en plein vol. Selon le rapport préliminaire,
l'avion aurait été livré sans les boulons prévus pour la maintenir en place. Ce dysfonctionnement attire l'attention
de la FAA, le régulateur de l'aviation aux États-Unis. Une enquête est ouverte
et de multiples manquements aux normes de qualité sont constatés
dans les usines Boeing. En parallèle, le Congrès mène l'enquête. Et le 17 avril 2024,
des lanceurs d'alerte sont auditionnés. Ce témoin n'en est pas
à sa première audition. Quelques années plus tôt,
il dénonçait déjà de sérieux dysfonctionnements. À l'époque, le Congrès
enquête sur 2 crashs de la gamme 737 Max. Et dans leur rapport,
les députés soulignent que depuis sa fusion avec l'avionneur McDonnell Douglas,
Boeing a tendance à délaisser les questions d'ingénierie,
et donc de sécurité, pour privilégier les profits financiers. En 2018 et 2019,
des défauts de conception sur le 737 Max, validés par Boeing
pour réduire ses coûts, mènent au crash de 2 avions
et à la mort de 346 personnes. Dans le rapport,
la FAA est également pointée du doigt et accusée d'avoir failli
à sa mission de supervision. Bon, alors, faut-il éviter de monter
dans un Boeing ? La réponse est un peu paradoxale,
car d'un côté, l'entreprise connaît
de réels dysfonctionnements. En février 2024,
un nouveau rapport de la FAA évoque toujours une méconnaissance
des normes de sécurité à plusieurs niveaux
de l'entreprise. Quelques mois plus tard,
son PDG est auditionné par le Congrès et rien n'indique
qu'il ait tiré les leçons du passé. Cette série de révélations
et le parallèle avec les 2 crashs de 737 Max inquiètent le public
et la moindre défaillance est scrutée. Pourtant, pour l'instant,
ces dysfonctionnements ne se traduisent pas en statistiques alarmantes. Aux États-Unis, les chiffres
de Boeing sont comparables à ceux de son principal concurrent. Et de manière générale,
l'avion reste bien plus sûr que la voiture. Malgré les dysfonctionnements,
la sécurité des avions Boeing ne semble donc pas aller plus mal que d'habitude. Mais avec une autre culture
et un meilleur contrôle, elle pourrait probablement
être encore meilleure. Ah oui, et si vous vous demandez
toujours comment les différencier, le 737 se distingue de l'A320
par la forme de ses fenêtres. Et la gamme Max se distingue des autres 737
par ses moteurs ciselés à l'arrière.