- Il me fait de la peine. Viens, beau gosse! Ca, c'est l'amour. - A.Casse: Les présidents,
les Premiers ministres passent, mais lui est toujours là. A.Duhamel a pourtant annoncé
que ce serait sa dernière saison à la télévision. On va en parler dans un instant. Il est notre premier invité. Bonsoir, Alain! Je vous embrasse. On est contents de vous recevoir. Vous êtes le premier invité
de la saison. On prépare déjà avec toute l'équipe
une mobilisation, une pétition On est contre! Vous avez annoncé
que ce serait votre dernière saison à la télévision après 60 ans
de carrière. - A.Duhamel: Ca fera 60 ans
à ce moment-là. - A.Casse: On a une belle surprise
tout à l'heure à vous montrer. Priorité à l'actualité. On a vécu une folle semaine. On a parfois cru que l'on
était dans une farce. Si c'était une pièce,
ce serait quoi? - A.Duhamel: Si c'était une pièce, ce serait "L'Invitation au château"
de J.Anouilh. C'est-à-dire une série
de personnages étranges qui croient A chaque fois, ils sont les dindons
de la farce. - A.Casse: On a vécu une semaine
assez longue avec, toutes les 2 heures, un nouveau nom
de futur Premier ministre. C'était presque une téléréalité. On vous refait le film
de la semaine. Voici les différents noms, jusqu'à
M.Barnier. Voici ses premiers mots à Matignon. - M.Barnier: Il y aura
dans cette nouvelle page des changements et des ruptures. Il faudra enfin beaucoup d'écoute,
beaucoup de respect. D'abord, du respect entre
le gouvernement et le Parlement. Du respect à l'égard
de toutes les forces politiques. - A.Casse: C'est clairement au RN
qu'il s'adresse dans cette partie de discours. Vous avez dû voir
la une de "Libération" ce vendredi: "Approuvé par M.Le Pen." - A.Duhamel: Je ne pense pas
que ce soit l'essentiel. M.Barnier, je le connais depuis
longtemps, depuis le milieu des années 70. Ca n'est ni un orateur,
ni un débateur, ni un leader charismatique. Mais dans cette phase
qui est quand même incroyablement surréaliste d'un point de vue
politique, il a un profil assez adapté. qui cherche des compromis. - A.Casse: Négociateur? - A.Duhamel: Et il y arrive! Ce n'est pas éblouissant,
on ne tombe pas amoureux, mais au bout du compte, il atteint
assez souvent les buts qu'il s'est fixés. Dans sa vie politique, ça n'a pas
toujours été idéal. Il y a eu des mauvaises phases. - A.Casse: A quoi pensez-vous? - A.Duhamel: Le moment où il a été
candidat à être désigné comme nouveau président
des Républicains. Mais dans l'ensemble, ses objectifs
ont été estimables. L'Elysée a bien failli changer
d'avis jeudi, en entendant sur France Inter
le député J.-P.Tanguy traiter M.Barnier de "fossile". Il a aussi dit que c'était
un des hommes politiques les plus stupides
de la Ve République, ne comprenant rien en dehors d'une fiche. E.Macron aurait appelé M.Le Pen. Quand on connaît la suite,
on devine ce qu'il lui a dit. Est-ce que ça veut dire
qu'il va échapper à une motion de censure? - A.Duhamel: Je ne suis pas
dans la tête de M.Le Pen, je n'ai pas envie d'y être. Si elle décide qu'il y a une motion
de censure, le gouvernement est balayé. - N.Polony: Alain, est-ce
que vous pensez que dans la stratégie du RN,
il faut intégrer le fait qu'à la fin du mois, le procès
de M.Le Pen débute? Ca peut inciter le RN à éviter trop
de chambardements. - A.Duhamel: C'est un des facteurs
qui ne m'a pas échappé, effectivement. Mais Tanguy, s'il s'agit de mesurer
la stupidité, il est assez bien placé. Je n'ai jamais entendu quelqu'un
s'exprimer comme ça. Même au temps où les communistes
étaient terribles... Ils disaient des horreurs. Mais une bêtise de ce genre,
ça mérite d'être couronné! - A.Casse: Ca raconte l'état
du débat public aujourd'hui. On a vu les consultations
s'enchaîner. Il a notamment reçu G.Larcher,
L.Wauquiez, B.Retailleau. La droite est de retour. On parle pourtant du Ve groupe
à l'Assemblée nationale. Ca peut surprendre. - A.Duhamel: Je pense que Macron
a eu complètement tort sur un point. Il aurait dû commencer par faire
voter L.Castets. - A.Casse: La candidate du NFP? Ils sont arrivés en tête. Ca ne veut pas dire
qu'ils ont des chances d'avoir la majorité... - A.Casse: Il fallait l'attester
par principe? - A.Duhamel: Par tradition
et par instinct politique. Elle se serait présentée,
elle aurait présenté son programme. Elle aurait été censurée, au bout
d'une semaine ou deux semaines. Mais inévitablement,
puisque son programme est aux antipodes... - A.Casse: Ca aurait aidé E.Macron
à mieux négocier après? - A.Duhamel: Il aurait été pris
plus au sérieux pour discuter. Ca ne s'est pas fait, c'est
une erreur. Mais le profil de M.Barnier
est adapté à une situation où, s'il n'y a pas de compromis, on va faire
un blocage. A ce moment-là,
on est dans une crise politique, et ça peut engendrer une crise
de régime. Ce n'est pas souhaitable. - A.Casse: Comment ça peut tenir? Quelle rupture avec E.Macron? - M.Barnier: Qu'est-ce
qui me sépare de monsieur Macron, que je veux remplacer? Du respect, de la considération. Vous ne m'entendrez jamais dire
qu'il y a des hommes et des femmes, des citoyens, des gens
qui ne sont rien. Je sais ce qu'est une cordée. C'est chacun pour tous. - A.Casse: Pour que ça tienne,
il faut qu'il y ait une rupture. - A.Duhamel: Rupture, je ne sais
pas s'il y aura une rupture de politique économique,
par exemple. Beaucoup de gens le souhaiteraient. Pas forcément à juste titre. Mais la majorité le souhaiterait
quand même. En même temps, il ne sera pas
dans la main d'E.Macron. Là-dessus, les choses seront assez
visibles. On aura déjà un critère,
qui est le choix des ministres. On verra si le choix des ministres
est du Barnier ou du Macron. C'est toujours intéressant
pour les journalistes, et peut-être catastrophique pour le pays. - A.Casse: Même pour vous, c'est
du jamais-vu? - A.Duhamel: Oui, absolument. Au fond, on a affaire
à une cohabitation multiple. Je pense qu'il y aura
une cohabitation entre M.Barnier et E.Macron. - A.Casse: Il parlait
de coexistence exigeante. - A.Duhamel: Oui, mais ce n'est pas
ce que je pense. M.Barnier défendra
ses prérogatives. Cohabitation avec E.Macron,
ce qui est toujours difficile. Cohabitation avec la gauche,
qui ne veut pas de M.Barnier. qui donne le sentiment
de le ménager pour l'instant, mais dont on ne sait absolument pas
comment ils réagiront après le discours de politique générale. Et même, ce qui est nouveau,
est un peu inattendu, cohabitation avec le bloc central. Les députés élus dans le sillage
d'E.Macron sont loin d'être enchantés par la situation
qui se pose. Ils sont attachés à un certain
nombre de choses qui ne sont pas forcément les mêmes que M.Barnier. Il a 5 adversaires. Ce n'est pas mal,
pour une personne! - A.Casse: Un commentaire
sur ce qu'il s'est passé mercredi, que l'ancien Premier ministre,
E.Philippe, était candidat à la présidentielle. Il a pris de court certains
de ses proches, qui lui en veulent encore. Il anticipe une présidentielle
anticipée. Ce n'est pas sans rappeler Pompidou
en 1969. - A.Duhamel: Evidemment, c'est
à ça que ça ressemble. Pour la même raison,
qui est que si G.Pompidou a laissé entendre au moins directement... - A.Casse: "Ce n'est un mystère pour personne que je serai candidat
à la présidence de la République, quand il y en aura une." se sont déterminées, 3 ans avant,
l'échéance théorique. Ils ont été persuadés
l'un comme l'autre que l'échéance serait dans l'année. - A.Casse: A juste titre? - A.Duhamel: Oui, il y a
une échéance. - A.Casse: Laquelle? - A.Duhamel: Si, par exemple,
il y avait une motion de censure contre M.Barnier au bout de 15
jours, il y aura sûrement une 2e tentative avec un autre Premier
ministre. Si, à son tour,
il y avait une motion de censure...